Le dernier rêve de de Gaulle, la Chine !
Posté par ITgium le 10 décembre 2013
A jùn mǎ 俊 马 tale 故事 (François de la Chevalerie)
Quelque mois avant sa mort, le 9 novembre 1970, le Général de Gaulle préparait activement son voyage en Chine.
Parce qu’il avait été le premier chef d’Etat à reconnaître la Chine, en 1964, le Général avait le souhait de réaffirmer ce geste par une présence sur le sol chinois, ce qu’il n’avait pas accompli durant l’exercice de ses mandats présidentiels.
Sans doute voulait faire résonner le mot d’esprit qui lui prêté : “La Chine est un grand pays habité par des chinois.”
En vue de ce voyage, le général s’enquit des meilleurs lectures : « la comédie humaine » d’André Malraux ; « un Barbare en Asie » d’Henri Michaux et surtout les merveilleux récits du père jésuite Matteo Ricci que l’on appelle en Chine Lì Mǎdòu (利瑪竇) or Xītài (西泰) selon que l’on se trouve dans le Hebei ou le Hubai.
Il consulta encore le journal de Pierre Teilhard de Chardin, philosophe et paléontologue dans le désert de Gobi, avec une interrogation en filigrane.
Comment se fait-il que cet intellectuel de premier plan n’ait pas rejoint Londres en 1940 ?
Se peut-il que la Chine soit si absorbante ?
Parcourant les allées de la Boisserie, le Général cherche à éclaircir ce mystère.
Les hommes de la longue marche (Chángzhēng 长征) ne portaient-ils pas à cœur leur engagement comme le firent autant les français libres ? se demande-t-il.
L’engagement, n’est-ce pas le commencement de tout ?
Et c’est alors que naissent les premières strophes du discours qu’il entendait prononcer devant Mao Zedong (毛泽东), Zhōu Ēnlái (周恩来) et les pairs de Chine.
Se tenir droit entre ces hommes avant que la mort ne le chasse de ce monde, tel fût son dernier rêve.
Ce moment n’eut jamais lieu.
Quelques semaines plus tard, elle l’emporta élégamment, sans trop de souffrance.
Pour les chinois, nul héros ne meurt vraiment.
Par delà la mort (sǐ wáng), tout au long des siècles à venir, courant par delà les millénaires, il se maintient, le regard porté vers un avenir s’annonçant comme l’éternité.
La mort venue, Il prend sa place parmi les grands de Chine, des Kǒng Fūzǐ (孔夫子), des Lǎozǐ (老子), très en verve.
Partout, dans chaque maison, les voilà se glissant dans les meubles.
S’accommodant à l’ombre, Ils écoutent l’homme de nos jours, s’amusent de son ignorance, une impossibilité à comprendre.
Nul silence mortifère dans les rangs.
Bien heureusement, chaque défunt porte la voix.
Plus que des saillies, des temps de paroles infinies, des fils déroulant de conseils et de jugements, jamais rompus par quelque clameur de rue.
A tout moment, à toutes heures, celle-ci ne comptant plus jamais, chacun s’exprime comme bon lui semble.
Tel qu’il fut, un grand homme, dài gāo lè (戴高乐) comme le nomme les chinois, le Général raconte la France, nullement sous des airs nostalgiques mais en célébrant plutôt une idée de l’existence humaine.
Se peut-il que les nations existeront encore dans mille ans ? lui demande Sun Zhongshan (孫中山).
La France de Molière sera-t-elle celle de Dante et de Goethe ? Ou celle de Cheikh Anta Diop, de Senghor, d’Octavio Paz et de Bái Jūyì (白居易) ?
Ses hôtes l’écoutent, s’impatientent d’une réponse qui ne peut venir.
Celle-ci dépend de l’intelligence des hommes vivant présentement sur Terre.
Seront-ils à la hauteur des enjeux ?
Auront-ils la force de combattre encore et toujours mille difficultés, ce trouble de vivre si peu de temps ?
Peut être faudra-t-il leur apporter quelque aide ?
Au besoin, l’heureuse tablée leur insufflera des ondes bienveillantes, celles du Général se comptant parmi d’autres.
Vue de Chine, la France ne sera jamais orpheline !
Elle sera toujours guidée par un souffle délicatement suggéré par les héros de l’histoire, plus encore par le tout venant ayant vécu un jour sur Terre, venant de l’inconnu.