Location à Pékin
Posté par ITgium le 11 juin 2013
Le récit de jùn mǎ 俊 马 故事
(François de la Chevalerie)
D’après les histoires de Christina Trabadello, originaire de Tampico au Mexique, John Anderson, natif de Perth en Australie et d’Augustinus Baumgartner habitant de Bonn en Allemagne.
Dangereuse destination
Si vous voulez vivre à Pékin, compte tenu de l’effrayante chape de pollution occupant son ciel et de la prolifération de particules délétères, il faut d’abord faire un décompte des jours vous restant à vivre.
Si d’aventure vous vous souhaitez une vie longue pour atteindre sans encombre la centaine, dans ce cas, il faudra choisir une autre destination, loin, le plus loin possible de ce que d’aucuns nomment l’enfer.
Si donc vous vous décidez pour des raisons professionnelles à résider à Pékin, alors il faudra admettre que chaque jour passé dans cette ville en retranchera plusieurs dans votre vie.
Si votre séjour en Chine est motivé pour une merveilleuse rencontre, préférez un tout autre lieu d’accueil pour nourrir votre amour.
Retenez l’adage : Trois ans passés à Pékin, trois ans de moins à vivre sur Terre.
Durant votre séjour, vous inonderez votre corps de métaux lourds, d’un amalgame invraisemblable de particules.
Toutefois, selon l’endroit où vous logerez, la dose sera différente.
D’où l’importance de bien le choisir.
Des ficelles pour vous arnaquer, des ficelles pour survivre
L’Agence immobilière
La première impression est curieuse.
Dans une salle plutôt étroite, une cinquantaine tête s’ébattent derrière des écrans. Complets et tailleurs, une certaine élégance. Aussitôt, des hommes sont dangereusement efféminés s’agglutinent autour de vous comme des abeilles, lâchant dans la mêlée des sourires narquois.
Ils le sont dans toute sa substance.
Ils s’amusent déjà à l’idée que vous allez tomber dans un piège.
Leur choix n’est pas le vôtre
D’emblée, ils vous proposent toutes sortes de bâtiment en tenant mollement compte de vos souhaits. Et pour cause, pour chaque produit placé, le vendeur reçoit une commission de son agence mais une autre bien plus reluisante du propriétaire laquelle est généralement négociée à l’insu de son employeur.
Dès lors, il vous entrainera là où sa marge est la plus confortable.
Bon sens : Demandez le point de vue du plus grand nombre de personne dans l’Agence de manière à les mettre en concurrence. Mais le mieux, le plus adroit, le plus dans les usages est de verser 1000 yuans à un vendeur aguerri en lui proposant deux fois plus si vous êtes faites affaire, vous y gagnerez alors.
L’emplacement du bâtiment
Finalement, vous vous décidez de visiter un appartement.
Les chinois ont une appréciation différente des occidentaux.
Ils ne se montrent pas très regardants sur l’environnement de l’immeuble.
Bon sens : Comme la plupart des édifices à Pékin se trouvent en bordure du ring (périphérique) ou dans des zones bruyantes, prenez toute précaution utile en vous faisant décrire par le menu le quartier.
Le bâtiment
Sur ce point sauf exception, tous les bâtiments sont laids à Pékin. Il faudra vous y faire en vous bandant le plus souvent les yeux.
Les matériaux du bâti
Avant de visiter votre appartement, vous ferez le tour de l’immeuble en vous rendant dans la cave et les escaliers de service.
Votre objectif (indispensable) est de repérer les matériaux dangereux qui pourraient vous conduire encore plus vite vers une mort certaine.
Par exemple, en Chine, de très nombreux bâtiments sont imbibés d’amiante pour une raison évidente : l’amiante amphibole est toujours autorisé en Chine. 450 000 tonnes sont produites chaque année.
Excellent pare feu, les fibres d’amiante sont extrêmement cancérigènes. Vous prendrez toute votre attention à regarder les tuyauteries. 40 % des immeubles de Pékin hébergent de l’amiante.
Pour le reste, les tuyauteries en plomb et autres ingrédients, vous chercherez à vous en accommoder sinon mieux vaut dormir dans la rue.
Prenez aussi une extrême attention à regarder les équipements anti incendie. Comme dans la plupart du temps, vous trouverez un logement au vingtième étage d’un immeuble, il faut vérifier si vous avez des chances de survivre dans l’éventualité d’un incendie.
A Shanghai, en 2011, un immeuble fort bien situé a brulé.
Bilan : 60 morts. Raison : L’immeuble ne comportait aucun système anti-incendie !
Bon sens : Vérifier tous ces éléments avec sérieux et détermination, il en va un peu de votre vie.
L’appartement
Vous y êtes donc !
Très rarement ou jamais, c’est le coup de foudre.
Plutôt une impression de désolation qui vous submergera longtemps. Le bon goût est rarement de mise ; le charme, une donnée inconnue.
Si l’appartement est meublé, vous risquez l’évanouissement. Les meubles sont d’une laideur à faire frémir. Mieux vaut l’achat à moindre coût de quelques meubles, plus doux du regard.
Passez votre tête sous les bidets, dessous règne généralement le plus sombre de bordels, lieu de fréquentation assidu des cafards, annonciateur de fuites.
Vérifiez encore les prises électriques, les jonctions avec les salles d’eau. Nullement souhaitez vous mourir comme Claude Francois.
Bon sens : Prenez un appartement libre de meubles, repeigner le avec des couleurs chaudes faisant écho au Mexique ou à l’Italie, vous serez alors bien plus heureux et le coût de ces travaux est insignifiant.
Contrat de location
Le contrat de location est un document étrange, tellement étrange que pratiquement aucun différend entre locataire et propriétaire ne vient au prétoire.
C’est donc dire qu’en dehors du montant et des quatre mois à verser immédiatement, il ne dit rien.
Cependant, regardez de près la ligne, « en cas de dommage ».
Pour une simple éraflure sur un fauteuil vous risquez de le payer en totalité.
Vous payerez donc en totalité un meuble horriblement laid qui vous a embué la vue durant tout votre séjour.
Le propriétaire (fáng dōng 房东)
Il vous importe à tout prix de savoir quel est le propriétaire le vrai de vrai. Faites vous répétez au moins cinq fois son nom et cherchez à le rencontrer de visu et à savoir ce qu’il fait.
Selon que le propriétaire est Pékinois ou sorti tout droit d’une misérable campagne, la donne sera différente.
Le propriétaire d’extraction Pékinois est sensible à sa réputation. Il vous traitera avec amabilité toutes les fois qu’il ne se décide pas à vouloir vendre son bien ou à augmenter le loyer.
Le propriétaire issu de province est un souci pour vous.
Il faut avoir à l’esprit que Pékin est la ville d’accueil par excellence des riches chinois issus des provinces bien davantage que Shanghai ou Guangzhou. Au delà de leur talent à faire de l’argent, ils sont généralement d’une irrésistible plouquerie, grand amateurs de KTV et de baijiu (白酒).
Comme 7 % des appartements appartiennent à Pékin des gérants de mines de charbon, il ne faudra attendre de sa part aucune écoute face à vos problèmes domestiques surtout si ce dernier est originaire du Shanxi, du Shaanxi ou du Henan.
Vous pouvez l’appeler cent fois pour un bidet en fuite, il ne vous répondra tout simplement pas.
Dehors du jour au lendemain.
Comme aujourd’hui la situation du marché immobilier chancelle en Chine, le propriétaire peut être tenté de revendre sine die son bien.
Vous vous verrez alors opposer un message liminaire de libération des lieux du jour au lendemain et ce sans reprise possible des travaux que vous avez pu entreprendre. Donc n’investissez jamais des mille et des cents dans l’appartement.
Inutile alors de pleurer surtout si vous parlez misérablement chinois.
Inutile de téléphoner à votre propriétaire si ce dernier vit dans le Shanxi.
Renouvellement du contrat de location
C’est a ce moment là que beaucoup d’Occidentaux se rendent compte que la chine, c’est l’enfer du capitalisme totalement débridé, un état d’absolu non droit.
Vous pouvez vous voir opposer des augmentations sans aucun rapport avec l’inflation. Parfois de 30 a 40 %.
Comment faire pour tenir tête à votre propriétaire ?
Bon sens :
Dès votre arrivée, vous allez à la rencontre du commissaire de police ( jǐng chá 警察 ) et du secrétaire général du district du parti.
Vous devenez aussitôt copain.
Vous leur dites que vous adorez le baojio, le huangjiu et les chansons de Dèng Lìjūn (邓丽君).
Vous les invitez à diner chez vous nullement avec l’intention de les corrompre mais de vous protéger.
Comme vous savez que votre propriétaire leur est redevable pour ses autorisations, dans l’éventualité où ce dernier chercherait à vous embêter, vous pouvez faire état de vos relations surtout si celui ci est propriétaire d’une mine à charbon dans le Shaanxi où généralement il ne respecte rien.
Si d’aventure, vous n’entreprenez pas des actions de séduction auprès des autorités locales, c’est votre propriétaire qui s’en accomplira. Dans ce cas, mieux vaut déguerpir aussitôt.
Si vos relations avec propriétaire s’enveniment et qu’il n’est pas très net, n’hésitez pas communiquer l’information sur Weibo. Les internautes se feront un régal de le sermonner.
Une suggestion
Il serait bien un jour qu’une base donnée sérieuse sur les propriétaires Pékinois et leurs antécédents puisse être établie.
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