Aimer la cinquantaine passée une femme chinoise d’âge égal
Posté par ITgium le 2 janvier 2013
D’après le livre autobiographique de Isidore Saint Just, « le miracle »
Les récits de jùn mǎ 俊 马 (François de la Chevalerie)
L’âge, ce mur franchissable
Ne plus pouvoir aimer la cinquantaine passée, c’est admettre que tout serait irrémédiablement figé.
L’âge venant, l’on se trouverait condamné, déjà une part de soi même dans la pierre tombale.
Sacha Guitry s’amuse de ces couples qui lassés par des années d’un faux compagnonnage ont les yeux rivés sur leurs assiettes durant les repas, bientôt incapables d’echanger le moindre mot.
Est-il seulement acceptable d’attendre une crise cardiaque, seul événement libérateur ? interroge Ixmulh.
Faut-il être raisonnable ? se demande Anxmandae de Leira.
L’age des os s’offre-t-il comme un verdict impitoyable ? poursuit Avlor Landic de Hazelrof.
Croyez moi, mieux vaut l’approche d’un combattant !
Son nom, Isidore Saint Just.
Une belle nature d’homme, un lettré, droit dans ses bottes, comptant dans sa généalogie, un lieutenant-général comte d’Empire.
Isidore habite Guérande, une ville forteresse dont il s’est fait une armature.
Jamais rien n’altèrera son courage !
Embastillé dans un mariage sans issue, chaque matin, Jean Paul contemple l’océan, les lointains espaces, écoute le chant des mouettes, s’abreuve d’espoir.
Comme enivré par l’écume, il se construit un autre destin.
Il s’en ira, là où rien ne le prédestinait, en Chine (Zhōngguó dà lù).
« Au milieu du monde, j’ai vu la lumière » dit Malraux dans les Antimémoires.
Une femme chinoise ?
Il les aime à la lumière de Ch’ing-ling, Měilíng, Àilíng, les plus belles sœurs Sòng de tous les temps.
Il les aime l’oreille tendue, écoutant les voix charnelles de Zhou Xuan et de Dèng Lìjūn.
Il se souvient de Wǔ Zétiān, la seule impératrice de toute l’histoire de Chine.
Il reconnait le rôle de l’impératrice douairière T’seu Hi (Xixi) partie de rien pour arriver à gouverner l’Empire.
Il considère encore les voix du monde, celle de Guānshìyīn, Bodhisattva protéiforme incarnant la compassion ultime.
Fort de ces soutiens, il aime déjà Gu Lizhi.
A Nánjīng, celle-ci prie inlassablement fó 佛.
Le Bouddha généreux lui dit : « Viendra à toi le jour venu un fǎ guó rén.”
Là bas, Gu Lizhi est une femme à poigne, nièce de soldats ayant âprement combattu l’armée impériale japonaise, morts au champ d’honneur.
Shanghai, la rencontre (jiē rén)
Lorsqu’il l’aperçoit en sortant de l’avion, un spasme intérieur le surprend.
- C’est bien elle, je la reconnaîtrais entre mille !
Les yeux embués, ils s’embrassent aussitôt.
Tantôt un baiser chinois, taquin et généreux.
Tantôt un baiser français, corsé, la langue s’en allant.
Dans le hall de l’aéroport, soudain un silence.
Tous les regards se figent comme saisis par la beauté vertigineuse d’un amour naissant.
- Welcome to China ! dit-elle (huān yíng).
Déjà ils se racontent leur vie passée (wǎng shēng huó).
Heurs et malheurs !
A Guérande, à Nanjing.
Lui, durablement chahuté par une femme irascible.
Elle, en mauvais compagnonnage avec un rustre, s’adonnant à la boisson.
Des scènes glauques.
Ils parlent de leur infortune mais déjà s’annonce une autre récit (gù shi).
Homme de France en Chine.
Femme de Chine en France.
Ils rient ensemble.
Belle aventure que deux peuples unis sur l’autel de l’amour !
Ils se jurent une vie ensemble.
En Chine, en France, là où elle les portera.
Une brume à l’horizon
La merveilleuse énergie de ces cinquantenaires est malheureusement froissée par de pâles réalités administratives.
Gu Lizhi se voit plusieurs fois refuser son visa d’entrée en France.
Sans raison apparente, comme si la Loi devait l’emporter sur l’amour.
Isidore remue ciel et terre, tremble d’impatience.
Ils tiennent bon, ne baissent pas les bras.
A mille lieux de distance, leur amour ne cède pas.
Plutôt se conforte.
Belles âmes, celles-là !
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