Le blog d’une Chinoise de Shanghai
Posté par ITgium le 2 décembre 2012
Le blog d’une Chinoise, Sylvie Lin Jing [1]
Sylinjing 的博客
De 2005 à 2010, Sylvie Lin Jing, résidant à Shanghai, entretient un blog sur sina.com.
Ci-après, le Décryptage de son blog.
Préambule
Tenir un blog, jour après jour et au hasard des sujets, c’est révéler une partie de soi même.
Sylvie Lin Jing, c’est faire vivre sa féminité.
A cela, s’ajoute sa passion pour les Arts, le tout donne le sentiment d’une femme dotée d’une forte sensibilité.
Tenir un blog, c’est aussi un besoin d’exister et peut-être d’être heureux.
Dans un rare enchevêtrement, s’y déversent mille idées, mille lubies.
Des marques de vêtement côtoient des grands noms du cinéma, de la littérature.
Et, au milieu, une émotion, de l’amour, un insondable plaisir de vivre.
François de la Chevalerie
Thèmes :
(1) Sylvie et sa garde robe
(2) Le cinéma selon Sylvie
(3) La littérature, le plaisir de Sylvie
(4) Sylvie, entre musique, peinture et danse
(5) Le tour du monde d’après Sylvie Lin Jing
(6) Sylvie, elle même !
Sylvie et sa garde robe
Comme beaucoup de Shanghaiennes, Sylvie adore plus que tout lécher les vitrines.
A chaque ouverture de magasin, elle s’offre un commentaire.
La voilà détaillant l’achalandage de la première boutique de DUTTI MASSIMO à Nanjing West Road.
Plus loin, elle a remarqué une robe écarlate dans la boutique Zara.
Mais légèrement complexée, elle ne veut pas s’y rendre seule.
Elle lance un appel.
- Qui veut s’y rendre avec moi ?
Chaque année, Sylvie recompose sa garde-robe.
Une sorte de rituel qui lui procure beaucoup de plaisir mais aussi de l’inquiétude.
Il s’agit, en effet, d’un moment délicat car pour faire rentrer de nouveaux habits dans des armoires par trop pleines, il faudra irrémédiablement se séparer de certains vêtements appelés à être sommairement jetés à la poubelle.
Apparemment, cette opinion n’est pas partagée par son frère qui ne comprend pas l’intérêt d’une telle démarche, se contentant lui de porter le même chandail depuis vingt ans.
- Deux positions irréconciliables, admet-t-elle.
Selon Sylvie, le principal problème de cette opération dite du printemps, c’est que chaque vêtement illustre un moment particulier.
Par exemple, cette robe blanche savamment dentelée porte la mémoire d’une souffrance.
Cette jupe d’un ton ocre rappelle une immense joie.
La seconde étant bien davantage abîmée que la première, que faire ?
Ainsi, jeter un vêtement n’est jamais un geste simple.
Désemparée, Sylvie adresse un message à Nina :
- Ma garde-robe sera pour longtemps un micmac invraisemblable !
Chaque fois que s’annonce le week-end, Sylvie dit éprouver un sentiment de peur.
- Peut-être est-ce le moment de penser ? croit-elle.
Penser ou faire du shopping, question cruciale pour une belle Shanghaienne.
Opiniâtre consommatrice sur Internet, errant de site en site à la recherche d’une robe rouge ou d’un chemisier en soie, Sylvie s’interroge.
Qui se cache derrière la toile, ce temple de la consommation ?
Elle répond sur un ton amusé :
- Félicitations ! En y venant, vous avez rejoint la pègre !
Le cinéma selon Sylvie
Elle s’interroge :
- Pourquoi les Chinois ne connaissent-ils pas Alain Delon ?
Sylvie s’offre une double réponse.
- L’homme est désormais vieux, déclare-t-elle.
Mais surtout, il ne tient pas la comparaison face à une Romy Schneider.
- Romy est belle, savoureuse comme le jade humide, suggère-t-elle.
Sylvie aime la beauté.
Donc elle adore la publicité de Dolce & Gabbana, société de prêt-à-porter de luxe basée à Legnano, et laquelle couvre les murs de Shanghai au printemps 2010.
- Une publicité vraiment agréable, note-t-elle.
Cela lui rappelle les images en noir et blanc du cinéma italien des années cinquante et soixante des mémorables Federico Fellini, Michelangelo Antonioni et Vittorio De Sica.
Dans leurs films, remarque-t-elle, les femmes sont dotées d’une impressionnante force intérieure !
“Il Segno di Venere » est le film culte d’une femme qu’elle vénère, Sophia Loren.
Mais attention, Sylvie sait porter le fer au besoin.
- Le maquillage artificiel de Madonna fait pauvre et vulgaire face à la beauté délicate et raffinée d’une Monica Vitti.
Le grand plaisir de Sylvie, c’est de voir des films et d’en raconter les récits.
Elle s’étonne de la durée si courte, quelques jours seulement, de la relation totalement improbable entre deux êtres dans le films The Bridges of Madison County.
- Comment une femme décente s’est-elle laissée submerger par un amour inattendu sur une route mouillée, à sept heures du matin ? se demande-t-elle.
Elle croit en avoir la réponse :
- Dans un univers rempli de nébuleuses, vivre une seule fois l’amour n’est jamais trop tard ! Cette rencontre fortuite a forgé son destin.
Sylvie s’émerveille devant le film de Jacques Rivette, 36 VUES DU PIC SAINT-LOUP où l’acteur Sergio Castellitto, dit-elle, joue le cœur battant.
La littérature, le plaisir de Sylvie
Entre deux DVD de Maria Callas, elle s’empare d’une tripotée de livres : des romans policiers de Chandler, les biographies de Gustav Mahler et de Wladimir Horowitz mais aussi un ouvrage de Hú Shì, philosophe et écrivain chinois.
Aujourd’hui, Sylvie lance un débat sur le dernier roman de Yan Geling, « les choses de la vie ».
Elle dit en avoir fait une heureuse lecture.
Elle s’interroge sur l’importance des émotions dans la vie sans pour autant trouver de réponse.
- Peut être trouverais-je des bribes d’émotion en allant dans les pubs de Shanghai ?
Vient ce récit.
- Il y a beaucoup de pubs à Shanghai. L’ambiance est toujours un peu près pareille. Mais, ajoute-t-elle, l’arrivée d’un homme peut sauver la situation.
Voilà qu’elle rencontre un homme poli et courtois. C’est alors que surgit une merveilleuse incidente :
- J’étais ravie car je pouvais me prouver à moi-même que ma féminité n’avait pas diminué.
Enfin, ce mot inattendu :
- Louis, je crois que c’est le début d’une belle amitié, dit-elle à son interlocuteur, laissant sans doute ce dernier tristement interdit.
Sylvie, entre musique, peinture et danse
Cependant, Sylvie a déjà l’esprit ailleurs.
Elle chantonne à tue tête « les miséreux de la butte », une chanson de Cora Vaucaire.
- Pourquoi ces refrains sont si peu connus en France ? se demande-t-elle.
Toutefois, elle pleure toujours à l’écoute de l’Adagio en ut mineur de Joannes Chrysostomus Wolfgangus Theophilus Mozart.
Voilà qu’elle achète maintenant un petit tableau à Moganshan Road dont le nom est porteur d’espoir , « l’Elixir d’amour », une peinture à l’encre.
Elle se promène souvent dans le quartier artistique de Shanghai, s’intéresse à Lao Gupo :
- Toujours laid et rugueux, comme l’art brut, dit-elle.
Elle se lance alors dans une réflexion.
- Devant les peintures de Botticelli et de Caravage, beaucoup se demandaient à l’époque s’ils étaient mauvais ou bons. Le temps a résolu cette question, conclut-elle.
Elle admire encore Pina Bausch dont la magie des figures sombre dans l’invisible.
Le tour du monde d’après Sylvie Lin Jing
Cette fois, Sylvie boude.
Elle voulait se rendre au Japon mais elle constate amèrement que les procédures pour obtenir le visa sont compliquées. Elle décide de surseoir à ce projet.
Qu’importe ! Elle formule un vœu !
- L’Italie, mon pays préféré ! Je n’ai pas d’autre objectif dans la vie que celui d’y vivre !
Aussitôt, elle énumère des lieux magiques.
Le val d’Orcia, une vaste vallée située dans la province de Sienne, en Toscane.
Viterbo, dans le Latium, où s’élevait avant une ville étrusque.
Positano, ville fondée selon la légende par Neptune, comme un clin d’oeil à « la Dolce Vita »
Les iles Lipari, pour retrouver l’atmosphère méditerranéenne !
Rome, sous le regard d’Anita Eckberg.
Et Venise, dit-elle, Absolument ! Absolument !
Et Prague ? s’interroge-t-elle.
Pour Sylvie Lin Jin, toute ville est inespérable de la patte d’un écrivain.
Après avoir rédigé une longue note critique sur l’œuvre de Kundera, elle hésite à l’admirer.
Elle n’apprécie pas, dans le fond, « L’Insoutenable Légèreté de l’être » cette idée que l’homme n’ayant qu’une seule vie à vivre doit être irresponsable.
Cependant, elle aime Prague.
- Ce que j’aime, c’est l’absinthe. Sa couleur verte est extrêmement fausse. Les gens le boivent dans une impulsion rapide car l’absinthe est censée chasser la frustration et l’anxiété qui guette les artistes.
Lecture encore du magazine National Geographic où elle s’émeut de la splendeur des photos d’Angkor Wat.
Sylvie, elle même !
Ce texte :
- Lorsque j’ai regardé lors des Jeux Olympiques ces milliers des bénévoles et athlètes, les yeux charges d’émotion, je n’ai pu m’empêcher de penser en silence. Je devais l’admettre, je ne suis pas une personne altruiste. Jamais je ne ferai ce qu’ils font !
Son amie d’enfance, MARY, sur le chemin des Etats-Unis, s’est arrêtée pour la rencontrer à Shanghai.
Elles évoquent leurs souvenirs.
De la maternelle, de l’école primaire, du premier cycle du secondaire, lycée, le temps où elles faisaient leurs devoirs ensemble, pratiquaient la calligraphie, apprenaient l’anglais, taquinaient les garçons.
Et pour conclure, elle se laisse porter par un poème de David Lehman
When she says Margarita she means Daiquiri.
When she says quixotic she means mercurial.
And when she says, « I’ll never speak to you again, »
she means, « Put your arms around me from behind
as I stand disconsolate at the window. »
He’s supposed to know that.
When a man loves a woman he is in New York and she is in Virginia
or he is in Boston, writing, and she is in New York, reading,
or she is wearing a sweater and sunglasses in Balboa Park and he is raking leaves in
Ithaca
or he is driving to East Hampton and she is standing disconsolate
at the window overlooking the bay
where a regatta of many-colored sails is going on
while he is stuck in traffic on the Long Island Expressway.
When a woman loves a man it is one-ten in the morning,
she is asleep he is watching the ball scores and eating pretzels
drinking lemonade
and two hours later he wakes up and staggers into bed
where she remains asleep and very warm.
When she says tomorrow she means in three or four weeks.
When she says, « We’re talking about me now, »
he stops talking. Her best friend comes over and says,
« Did somebody die? »
When a woman loves a man, they have gone
to swim naked in the stream
on a glorious July day
with the sound of the waterfall like a chuckle
of water ruching over smooth rocks,
and there is nothing alien in the universe.
Ripe apples fall about them.
What else can they do but eat?
When he says, « Ours is a transitional era. »
« That’s very original of you, » she replies,
dry as the Martini he is sipping.
They fight all the time
It’s fun
What do I owe you?
Let’s start with an apology
Ok, I’m sorry, you dickhead.
A sign is held up saying « Laughter. »
It’s a silent picture.
« I’ve been fucked without a kiss, » she says,
« and you can quote me on that, »
which sounds great in an English accent.
One year they broke up seven times and threatened to do it
another nine times.
When a woman loves a man, she wants him to meet her at the
airport in a foreign country with a jeep.
When a man loves a woman he’s there. He doesn’t complain that she’s two hours late
and there’s nothing in the refrigerator.
When a woman loves a man, she wants to stay awake.
She’s like a child crying
at nightfall because she didn’t want the day to end.
When a man loves a woman, he watches her sleep, thinking:
as midnight to the moon is sleep to the beloved.
A thousand fireflies wink at him.
The frogs sound like the string section
of the orchestra warming up.
The stars dangle down like earrings the shape of grapes.
[1] http://blog.sina.com.cn/u/1894916834
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