La Tianjinoise, femme de Chine
Posté par ITgium le 2 octobre 2009
A priori, elles n’ont pas de réputation particulière. Ni leur physionomie, ni leur taille, ni leur allure ne leur confèrent une aura singulière de celle qui se répande jusqu’à l’autre bout de la planète.
Leur malheur serait-il d’être Tianjinoise ?
Vivant à l’ombre de Beijing, Tianjin porte durablement des souffrances. Ville industrielle ; ville encombrée ; ville polluée ; ville portuaire. Accablées par les mauvaises ondes, les Tianjinoises seraient-elles à l’image de leur ville : pâles, austères, tourmentées, affairées, bientôt épuisées ?
Si cela était vrai, pourquoi alors nombre d’occidentaux se laissent-ils surprendre ?
Pourquoi le cœur d’une Tianjinoise vaut-il bien mieux que tout l’or du monde ?
D’abord, les femmes de Tianjin présentent une remarquable qualité que l’on retrouve chez l’ensemble de la population de la ville. Une gentillesse naturelle, jamais feinte. S’en nourrissant, les femmes de Tianjin sont aimables, chaleureuses. Nullement compassées, elles rient facilement, s’amusent. Toujours généreuses.
Elégantes, elles ne sont pas empruntées comme peuvent l’être les Beijinoises. Nullement à la recherche de quelque récompense mal acquise, elles s’habillent honnêtement. Rares sont celles qui paradent ! Rares sont les vantardes ! C’est vrai que Nanjing Lu ou la promenade le long du Hai He ne sont pas autant concourus que les avenues de Beijing.
C’est vrai aussi qu’elles n’ont pas à lutter contre les hordes de Russes, d’Ouigours, de Philippines qui tiennent la dragée haute aux Hans dans les bars de Sanlitun et au China Bar à Chang’an Jie. A Beijing, la chasse est rude. L’on tire à vue ! Peu d’amis dans la mêlée ! Si d’aventure il se trouve une Bejinoise dans les bras d’un milliardaire, elle se tiendra à carreau ! Elle sait que sa survie ne tient qu’à un fil. Du jour au lendemain, il se comptera toujours plus belle, plus jeune, pour rafler la mise.
De ces jeux, la Tianjinoise se moque. Plutôt que sur le pied de guerre, elle offre son sourire. Regard de velours, charmante, bientôt accomplie. Elle sait trouver le mot juste pour convaincre. Elle s’y exerce sans éclat mais avec détermination.
Déjà la voilà, vous invitant à la fête de l’automne avec sa famille. L’on vous salue alors comme si vous étiez des meubles, de leur histoire. Fils, l’ami, l’amant, le faguoren ! La gorge siphonnée au ganbei, l’on vous donne un nom chinois.
« Junma »,dans mon cas.
Vous voilà honoré, Junma, d’une gloire dont il est craindre qu’elle ne devienne maritale.
A-t-elle manigancé cela ? Est-elle la pièce maitresse d’un plan ourdi de longue date ? Sa famille est-elle complice ? L’on rage, se maudissant ! La candeur en Chine est un vilain péché. La traitrise ne durera pas, un seul objectif, la porte de sortie !
C’est alors que le visage amusé, la Tianjinoise vous dit : « Junma, j’ai appelé un taxi. Comme votre chinois est à son commencement, j’ai écrit votre adresse sur un bout de papier. Vous le porterez à la connaissance du chauffeur et tout ira bien. »
C’est qu’elle pense à tout la Tianjinoise ! A nos peurs d’homme comme aussi à nos défaillances linguistiques.Talentueuse diplomate, elle ouvre même des perspectives à notre connaissance terriblement molle du chinois.
La nuit avancée, elle n’ira pas vous surprendre par un coup de téléphone jeté au hasard. Peut-être vous contactera dans la semaine ? Rien n’est moins sûr, elle n’est pas du genre à s’impatienter ! Son peuple a vécu cinq mille ans, elle saura retenir son souffle le temps qu’il faudra.
Vous voilà démuni ! Tant de qualité portent ombrage à votre situation d’homme libre.
Bousculé, l’on hisse alors la voile l’appelant, l’interpellant. Rampant, à genoux, l’on promet la vie !
« Le voyage s’annonce heureux »,disait Deng Yingchao à Zhou Enlai, son futur époux, qu’elle rencontra à Tianjin en 1923.
Traversant mille péripéties, Ils vécurent cinquante ans l’un auprès de l’autre, s’aimant, d’adorant, protégeant le peuple chinois.
François de la Chevalerie (Junma)
Octobre 2009